Zoom sur le fonctionnement du marché des montres d’occasion

Zoom sur le fonctionnement du marché des montres d'occasion

« Mais je ne comprends pas… vous vendez les Rolex plus chères que le prix catalogue ?! »

C’est une question à laquelle nous sommes amenés à répondre régulièrement en boutique face à l’incompréhension de certains clients. C’est ce qui nous a poussé à écrire cet article.

Le monde de l’horlogerie connait aujourd’hui une situation qui étonne, agace ou désespère un bon nombre d’amateurs de montres de luxe, à savoir la difficulté ou même l’impossibilité d’acheter une montre neuve chez un détaillant officiel.

En effet, que ce soit Rolex, Audemars Piguet, Patek Philippe ou même Vacheron Constantin pour certains modèles, le client doit obligatoirement passer par des listes d’attente interminables pour avoir accès à la montre de son choix. On parle de plusieurs mois, voire plusieurs années, pour les modèles les plus prisés comme la fameuse Rolex Daytona ou une Patek Philippe Nautilus par exemple. Certains modèles ou gammes de produits sont même exclusivement réservés aux meilleurs clients ayant les historiques d’achat les plus importants…

Cette situation, difficile à vivre pour les passionnés d’horlogerie ou les amateurs de belles montres, découle simplement d’un écart qui n’a cessé de se creuser depuis quelques années entre une offre limitée de la part des marques et une demande de plus en plus forte avec une multiplication des typologies de clients. En fin de compte, les maisons suisses ne produisent pas assez de montres pour répondre à la demande des clients.

Le résultat : l’explosion d’un marché secondaire de l’occasion, aussi appelé « marché gris » ou « marché parallèle ». Ce marché des montres d’occasion est parfaitement légal, on y retrouve aussi bien des particuliers que des professionnels certifiés qui exercent depuis de nombreuses années. C’est sur ce créneau que Francine Joaillerie est spécialisée depuis 1986.

Ce marché permet d’obtenir des modèles de montres introuvables en boutique officielle. Le revers de la médaille ? Des prix nettement plus élevés que les prix publics proposés par les marques horlogères car les montres sont disponibles immédiatement. On y trouve aussi bien des montres en état neuf que des occasions et même des montres vintage prisées des collectionneurs.

Alternative devenue incontournable pour quiconque souhaite acquérir une montre de luxe sans attendre, le marché de l’occasion connait une croissance fulgurante depuis environ 3 ans avec des prix qui ne cessent de grimper.

Si ce phénomène d’offre très limitée et de demande importante concernait au départ qu’une poignée de marque comme Rolex, Audemars Piguet ou Patek Philippe, on constate aujourd’hui la même tendance sur d’autres marques comme Vacheron Constantin avec le modèle Overseas, ou Cartier avec les Santos pour lesquels les prix de l’occasion dépassent maintenant les prix du neuf sur certaines références…

Si certains déplorent des tarifs plus élevés que les prix catalogues sur ce marché de l’occasion, d’autres sont ravis de faire un investissement plaisir en trouvant la montre de leur rêve, tout en sachant que sa valeur va largement s’apprécier au fil des années…

Pourquoi les marques d’horlogerie de luxe ne produisent t-elles pas plus ? D’où viennent toutes les montres que l’on peut trouver sur le marché de la montre d’occasion ? Nous allons essayer d’apporter un éclairage sur ce marché singulier qui suscite beaucoup de questions.

Pourquoi les grandes maisons d’horlogerie n’augmentent pas leur production?

Pourquoi la demande explose t-elle autant alors que ce sont des produits de luxe ?

          Les manufactures horlogères ne communiquent pas beaucoup sur les chiffres de leur production mais il en ressort tout de même des tendances et estimations qui donnent des ordres de grandeur.

Ce sont les mots de son directeur général François-Henry Bennahmias qui annonce que la maison « Audemars Piguet produira environ 50.000 montres en 2022 et au maximum 1400 pièces par référence ». Si cela peut paraitre beaucoup, réparties sur 120 points de vente dans le monde, ça ne fait que « 12 montres par boutique pour les références les plus produites, soit 1 par mois ! ». Quand on sait qu’il y a plusieurs dizaines de clients qui s’inscrivent sur liste d’attente chaque semaine voire chaque jour, on comprend vite que les délais d’attente deviennent interminables…

          Une production déjà élevée…

Audemars Piguet produisait environ 40.000 pièces en 2018, elle en produit aujourd’hui 50.000 donc sa production a déjà augmenté de 25% en 4 ans. Audemars Piguet prévoit encore de l’augmenter progressivement grâce à une nouvelle manufacture mais cela nécessite du temps, des investissements et des artisans compétents qui se raréfient dans les métiers de l’horlogerie.

Concernant Rolex qui est la marque largement leader du marché de l’horlogerie de luxe avec près de 30% de parts de marché, sa production est estimé a environ 1,2 million de pièces par an. Il faut savoir que Rolex produisait environ 800.000 montres en 2014, la production a donc augmenté de 50% en 8 ans !

Aujourd’hui, on constate aisément que cette production n’est pas suffisante pour répondre à l’intégralité de la demande du marché. Or, cette production représente grossièrement 2700 pièces produites par jour, ce qui est déjà énorme pour une manufacture de luxe, au regard des finitions faites à la mains et du nombre de corps de métier de haut niveau artisanal intervenant dans le processus de fabrication.

          Une main d’oeuvre qualifiée, mais pas illimitée…

Il faut bien savoir qu’au total, ce sont des dizaines d’artisans aux spécialités diverses et variées qui travaillent à l’élaboration d’une montre. Il y a notamment le polissage, le sertissage, le guillochage, l’achevage, les gravures, le laquage… Toutes ces étapes requièrent un travail à la main d’une extrême précision qui n’est pas compatible avec la production de masse.

D’autant plus que les métiers de l’horlogerie et plus largement l’artisanat de haut rang sont des métiers qui font l’objet d’une pénurie progressive. Il est vrai que les grandes manufactures ont mis en place des centres de formation pour pouvoir transmettre leur savoir-faire et former leur futurs horlogers. Pour autant, l’idée de voir augmenter subitement la production paraît tout simplement impossible quand on sait qu’il faut compter jusqu’à 5 ans pour compléter sa formation d’horloger.

          Des standards de qualité incompatibles avec une production de masse

Enfin, il faut savoir que les grandes manufactures de montres sont extrêmement attachées à leur image de marque et s’imposent des contrôles qualité drastiques en sortie de production. Quelques manufactures ont en effet créé leurs propres labels, parfois bien plus sévère que le COSC (Contrôle Officiel Suisse des Chronomètres) qui sert de référence dans le contrôle de la précision des mouvements horlogers.

Rolex a par exemple introduit en 2015, la certification « Chronomètre superlatif » qui a pour vocation de contrôler l’ensemble des détails de bon fonctionnement des montres sortant de production: un seuil de tolérance de -2/+2 secondes de variation horaire par jour, l’étanchéité en grande profondeur, test de la réserve de marche, résistance aux secousses ou aux UV… C’est l’une des certifications les plus strictes du marché au même titre que le poinçon Patek Philippe qui a remplacé le poinçon de Genève pour gagner en rigueur de qualité.

Aujourd’hui, grâce à des technologies de pointe et de nombreux ingénieurs, Rolex a réussi a automatiser et robotiser un ensemble de test de mise à l’épreuve des montres dans des conditions extrêmes. Mais cette automatisation ne peut évidemment pas être appliquée à l’ensemble de la chaine de production d’une montre où la compétence et la précision d’un horloger ne peuvent être remplacées.

Chez Patek Philippe où les finitions à la main sont parmi les plus précises du marché, une quelconque automatisation n’est absolument pas envisageable.

En résumé, les manufactures horlogères suisse ont bien enclenché une hausse de leur production mais elle sont clairement limitées par les ressources humaines et un savoir-faire de haute précision qui se transmet difficilement. Et la technicité et le temps nécessaires à la fabrication d’une montre ne leur permet pas de suivre le rythme explosif de la demande depuis quelques années.

Pourquoi la demande explose t-elle autant alors que ce sont des produits de luxe ?

          Des types de clients de plus en plus nombreux et variés…

Le marché des montres de luxe était déjà en tension il y a plusieurs années par la force naturelle des choses. Avec environ 7 milliards d’habitants sur terre, si on considère que 1% des plus riches veut s’offrir une montre de luxe, ça fait pas moins de 70 millions de personnes concernées. Quand on sait que l’horlogerie suisse produit 5 millions de pièces par an toutes marques confondues, on comprend déjà que tout le monde ne peut être servi…

Et si le marché des montres de luxe concernait auparavant les seuls amateurs de beaux garde-temps et les collectionneurs, il s’est aujourd’hui élargi à des intervenants d’un nouveau genre: des investisseurs ou des spéculateurs.

Constatant la hausse régulière des prix des montres due à cet écart entre l’offre et la demande, de nombreux particuliers y ont vu l’opportunité de faire un bénéfice grâce à des investissements financiers, en gardant les montres plusieurs années dans un coffre.

Nous voyons régulièrement des particuliers qui font le choix de venir voir les professionnels de la montre d’occasion comme Francine Joaillerie pour se faire racheter la montre achetée quelques minutes au préalable en boutique Rolex. Et contrairement à ce que croient certains, ce sont bien eux qui dégagent la plus grande partie du bénéfice, nous laissant des marges très faible pour travailler.

Des fonds d’investissements dédiés aux montres de luxe avec des moyens colossaux ont également fait leur apparition ces derniers temps promettant des rentabilités intéressantes à leurs clients…

Ce nouvel afflux d’intervenants a créé une saturation totale du marché si bien que les détaillants officiels ont commencé à mettre en place des listes d’attente, n’ayant pas assez de modèles disponibles pour la clientèle. L’inscription sur liste d’attente ne nécessitant pas le versement d’un acompte, énormément de personnes se sont inscrites dans le seul but de revendre plus cher d’occasion. Et cette spéculation n’a fait qu’empirer les choses en créant une sur-enchère au niveau des prix.

Chez Rolex par exemple, plus aucun modèle n’est disponible en achat direct sans passer par liste d’attente. Les clients sont donc obligés de payer plus cher pour obtenir la montre qu’ils veulent.

Début 2022 on a par exemple assisté à une phase où particuliers et professionnels se ruaient sur les Rolex Daytona 116500LN car les prix ont commencé à monter. Personne ne souhaitant passer à côté d’un potentiel cycle haussier, cela a crée une frénésie démentielle. En l’espace de 2 mois ce modèle est passé de 30.000€-35.000€ à 50.000€-55.000€ sur de la pure spéculation. Nous en avons été les premiers témoins puisque des clients nous achetaient ce modèle en Janvier pour 35.000€ et voulait nous revendre 55.000€ un mois plus tard… On parle d’un modèle toujours en production chez Rolex au prix catalogue de 14.650€ (en 2023) qui nécessite plusieurs années d’attente.

L’exemple des Patek Philippe Nautilus est tout aussi parlant, les prix sont montés sur certaines références à plus de 200.000€ début 2022, alors que nous en avions à la vente l’été 2021 vers 90.000€…

Aujourd’hui le marché de la montre s’apparente de plus en plus à celui de la bourse. Les intervenants achètent des modèles avec des perspectives de rentabilité. Ils scrutent de près les salons annuels des grandes maisons d’horlogerie pour ne pas rater l’annonce d’un arrêt de production qui déclencherait une hausse des prix.

Les grandes ventes aux enchères sont également surveillées au cas où l’une d’entre elles servirait de catalyseur. C’est d’ailleurs ce qu’il s’était passé avec la Patek Philippe Nautilus 5711 Tiffany, adjugée à plus de 6 millions de dollars en 2021. Dans les semaines qui ont suivies, les modèles Nautilus 5711 ont explosé au même titre que les Rolex Oyster Perpetual Tiffany…

Pour conclure, le marché de la montre d’occasion est devenu extrêmement dynamique avec de nombreux intervenants. C’est également un marché totalement pollué par la contre-façon et les montres aux pièces d’origine changées qui leur font perdre toute leur valeur. Ainsi le passage par l’expertise et la garantie d’un professionnel confirmé comme Francine Joaillerie Saint-Tropez est vivement conseillé pour éviter les mauvaises expériences qui peuvent coûter très chères…

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